[Utopiales 2018] La soif de découvertes [Partie 2]
Les Utopiales c’est un festival de SF et de science qui rameute 90 000 personnes autour de centaines de conférences et de rencontres. Auteurs de bédés, écrivains, scientifiques, sociologues, anthropologues, physiciens, astronomes, paléontologues, chercheurs etc… Moult personnalités différentes qui apportent leur pierre à l’édifice pendant quatre jours d’une haute densité ! Pour cette deuxième partie de bilan, Lazylumps, Flavius et Graour ont voulu mettre en avant une œuvre, un projet, une découverte qui nous a donné envie d’en savoir plus après ces Utopiales. Quelque chose de marquant qui nous a attiré et sur lequel nous allons nous pencher !
Dans la Toile du Temps d’Adrian Tchaikovsky
Lazylumps
Découvert lors d’une table ronde sur « Jurassic Park, un remède à la grande extinction ?« , Adrian Tchaikovsky m’a intrigué. Guère connu en France, il vient d’avoir son roman Dans la toile du temps traduit et publié en avril 2018 chez Denoël, une maison d’édition réputée pour distiller de la SF de qualité depuis de nombreuses années. Premier roman traduit donc pour cet auteur qui cumule les prix outre-manche dont le prestigieux prix Arthur C. Clarke en 2016 (Dans la toile du Temps) et le prix British Fantasy 2017 pour The Tiger and the Wolf, premier tome de sa série Echoes of the Fall ! Auteur de 21 livres dont trois séries, le gaillard est prolifique. Voilà pour le palmarès de l’auteur. Mais plus que son palmarès, sa justesse de propos et son analyse ainsi que son humour so british m’a donné envie d’en savoir plus sur lui. Bâtisseur de monde, « science-fictionneur » à n’en pas douter, zoologiste et psychologue de formation, Tchaikovsky captive ses auditeurs quand il prend la parole et imagine la fin du monde, le futur, ou tout simplement quand il se pose les questions sur le clonage de dinosaures et leur réhabilitation dans une nature qu’ils ne sauraient comprendre.
Ce grand bonhomme qui se cache derrière de broussailleux sourcils et une barbe qui lui mange le visage étonne, détonne même et provoque la curiosité. Je vous propose le résumé de l’éditeur pour vous donner l’eau à la bouche : « La Terre est au plus mal… Ses derniers habitants n’ont plus qu’un seul espoir : coloniser le « Monde de Kern », une planète lointaine, spécialement terraformée pour l’espèce humaine. Mais sur ce « monde vert » paradisiaque, tout ne s’est pas déroulé comme les scientifiques s’y attendaient. Une autre espèce que celle qui était prévue, aidée par un nanovirus, s’est parfaitement adaptée à ce nouvel environnement et elle n’a pas du tout l’intention de laisser sa place. Le choc de deux civilisations aussi différentes que possible semble inévitable. Qui seront donc les héritiers de l’ancienne Terre ? Qui sortira vainqueur du piège tendu par la toile du temps ? « .
De quoi attirer les trolls que nous sommes : Tchaikovsky réussira-t-il à s’imposer dans le paysage français de la science fiction ? Affaire à suivre !
L’œuvre d’Ursula K. Le Guin
Graour
Sa récente disparition au début de l’année aura marqué le petit monde de la science-fiction. Et pourtant, pour le grand public, cet événement relève largement de l’anecdotique… Cette discrétion médiatique peut paraître surprenante, si l’on tient compte de l’aura qui était la sienne dans les années 1970-1980 ; les connaisseurs n’hésitent pas à la citer parmi les plus grands écrivains de l’imaginaire du XXème siècle. Hé oui ! Pourquoi donc cette postérité déclinante ? Je serais bien en peine de vous le dire, n’ayant moi-même jamais lu un seul des livres d’Ursula Le Guin. J’explique cette ignorance par ma relative jeunesse (mâtinée d’une stupidité congénitale certaine).
Le thème retenu pour cette édition des Utopiales ne se prêtait pas toujours à une exploration minutieuse de ses ouvrages, mais son nom fut régulièrement cité au cours des différentes conférences. Difficile, en effet, de passer sous silence certaines de ses réflexions lorsqu’il s’agit de débattre sur le genre et le rapport au corps différencié qu’il suscite. Une table-ronde hommage était d’ailleurs organisée afin de revenir sur la richesse de son travail, qui s’est épanoui aussi bien en direction de la fantasy (Cycle de Terremer) que de la SF. Sa volonté de produire une littérature de l’imaginaire intelligente, nourrie de sciences sociales (notamment d’anthropologie), m’attire puissamment. C’est exactement ce que j’attends de ce type de bouquins, qui doivent permettre de « surchauffer le réel » selon le mot de P. Christin. En outre, si la personne dont il est question est une femme, dans un milieu malheureusement outrageusement dominé par les mâles (blancs), alors je me dis qu’il est grand temps de combler mes lacunes : faisant fi des couinements de mon compte en banque, je cours acheter La main gauche de la nuit (1971) !
Monstres et compagnie : Le petit bestiaire fantastique
Flavius
Le petit bestiaire fantastique est un livre jeunesse qui retrace l’histoire de monstres de la culture populaire, écrit par Thomas Olivri et illustré par Mister Hope. Autant vous le confesser tout de suite, je n’avais absolument jamais entendu parler ni des auteurs ni de leur récent ouvrage. Le hasard des Utopiales nous a amené à créer des affinités, dès l’an passé, et c’est à elles que je dois d’avoir découvert cet ouvrage, l’une d’elle en me montrant l’exposition des dessins de l’illustrateur anglais (qui était littéralement à 3 mètres à coté de moi) et l’autre pour m’avoir incité à aller à leur conférence. En clair mes chers lecteurs, je me suis laissé porter comme un roi fainéant, et ma foi cela ne m’a pas mal réussi. Le projet est très sympathique ; offrir à un jeune public une petite encyclopédie des monstres, parmi les plus connus (mais pas seulement), accompagnée de leurs origines mythologiques, leur ouvrant ainsi toutes grandes les portes de cet univers merveilleux. Outre les textes, le travail de Mister Hope a attiré mon attention ; très stylisé, presque minimaliste, son dessin possède une très forte identité graphique. Il utilise exclusivement les médiums traditionnels ; crayon sur papier, encrage au roller noir et couleur à aquarelle. De son propre aveu, il préfère ce contact factuel et tangible lorsqu’il dessine et franchement on peu dire que cela lui réussi fort bien.
Cette idée de projet est née dans la tête de Thomas Olivri qui, à travers un blog, Geek Art, mettait déjà en lumière des dessinateurs œuvrant dans cette mouvance si vaste et imprécise qu’est la culture « geek », ce fameux concept fourre-tout. Contacté par un éditeur il a décidé de réaliser une anthologie et il s’est tourné presque naturellement vers Mister Hope qui se trouvait être un des premiers artistes à avoir travaillé avec lui. Le résultat est un premier beau livre qui, les fêtes de Noël approchant, pourraient (devrait) se trouver sous le sapin des petits, les muses vous en seraient gré.
Pour conclure :
Un grand merci aux Utopiales, ce festival de qualité ou l’émerveillement, la réflexion et la découverte s’entremêlent si bien. Nous avons assisté à une édition 2018 de haute volée avec de nombreux invités fascinants. Coup de chapeau à une organisation aux petits oignons, et toujours là pour nous. Les trolls ne peuvent que vous recommander ce festival pour les années à venir. Un festival intelligent et nécessaire où le public est conquis à chaque fois.
Vivement l’année prochaine !
Le bilan partie une : http://www.cridutroll.fr/utopiales-2018-on-fait-lbilan-calmement-en-se-rememorant-chaque-instant-partie-1/