La séance Cinéma de Méla
Bon, comme j’ai la carte cinéma illimité, des fois, quand je m’ennuie, je vais me faire une toile. Et le souci, c’est que je m’ennuie vite, et beaucoup.
Alors, du coup, j’ai vite fait de voir toutes les daubes qui sortent, mais aujourd’hui j’ai décidé de vous parler d’un film que j’ai vu récemment, après avoir bu une bière qui n’était pas forcément bonne et beaucoup trop chère, merci la brasserie limougeaude célèbre dont on taira le nom mais qui est situé à côté du cinéma !
Jackie. Pas un film sur la mère de Michel Sardou, le biopic sur Madame Kennedy, avec Natalie Portman dans le rôle titre.
Déjà, avant même de rentrer dans la salle, tu sais que le film a hypé sévère de chez sévère, tant il y a du monde qui attend devant. Allez, pour toi, cher lecteur, voilà une chronique minute par minute de ce que j’ai vécu, histoire d’être au plus près des émotions que m’a procuré ce film.
Un jour, un destin
Déjà, j’avais passé une journée pas terrible, parce que j’étais malade et mon médecin n’avait pas pu me recevoir à cause d’une grosse épidémie de gastro-entérite. Voilà, tu t’en fous sûrement, mais ça te permet de situer le contexte.
Acte 1 scène 1, Méla tousse en attendant son pote devant le cinéma.
« Tiens, le monsieur qui vend les places a un peu l’air au bout de sa vie » fut ma première pensée. En effet, sûrement écœuré par le nombre de nanas qui avaient traîné leur copain/meilleure amie/animal de compagnie (rayez la mention inutile), il subissait la déferlante de « Ohlala ça a l’air trop bien et en plus, Natalie Portman est nommée à l’Oscar » , ce qui, quand on est Natalie Portman, est quand même la moindre des choses, sans oublier les « Attends, elle lui ressemble énormément quand même « . OUAIS CA VA ON A COMPRIS QU’ELLE AVAIT LA MÊME COUPE DE CHEVEUX QUE JACKIE KENNEDY POUR LES BESOINS DU FILM ALORS MAINTENANT TU DONNES TON BILLET AU MONSIEUR ET TU AVANCES BORDEL, J’AI L’IMPRESSION D’AVOIR COMMENCE LA QUEUE EN MARS 1984 . Voila, pèle mêle, ce que je ressentais, en attendant dans la file d’attente du cinéma que tout ce beau monde avance et nous laisse la place.
Dans la salle, il faisait relativement chaud. Peut être parce que je portais un gros pull en laine de mouton, ou peut être parce que les mecs ont craqué sur le thermostat, toujours est il que cinq minutes après le début des bandes annonces, je ressentais déjà le besoin de me coller un grand coup de FA sous chaque aisselle, c’est vous dire si j’étais à l’aise. Heureusement, le pote avec qui j’étais était soit très poli, soit mort du nez, car il ne m’a pas précisé que ça sentait plus le rat mort que les popcorns de mon côté de la salle.
Ah, les bandes annonces ! Voila une séance qui commence bien dis donc ! Ah mais c’est que ça a l’air d’être encore plus une merde que d’habitude, le nouveau film de Dany Boon. Voila qui devrait plaire à Tonton Gérard. De toute façon, après deux whiskys, lui, il serait capable de trouver du talent à tout le monde, même à Christophe Maé, ou pire, à Lazylumps, c’est te dire le level du mec. Enfin bon, c’est pas grave, attends la prochaine bande annonce, ça sera sûrement mieux.
10 minutes passent…
Donc en fait il n’y a eu qu’une seule bande annonce pour dix minutes de pub, dont une qui parlait non stop d’un expert fenêtre avec un chapeau ridicule (ceux qui fréquentent assidûment le cinéma comprendront cette vanne, les autres n’auront qu’à faire des efforts et faire semblant de la comprendre, c’est ce que je fais quand Flavius parle en latin, et ça fonctionne pas mal). Là, je suis un peu énervée, parce que, quand même, je préfères de loin les bandes annonces à une pub qui nous vante les bienfaits d’aller pique-niquer avec Bobonne le dimanche à Saint Pardoux. Je décide donc de commencer à manger agressivement mes popcorns, en signe de protestation, et pour faire chier les gens qui ont payé 10 balles le film. On est trolls jusqu’au bout ou on ne l’est pas.
Jackie, Jackie, ta 4L, ta 4L
Ah bien, voilà , enfin, le film commence. Mon pote à côté de moi n’arrête pas de tousser, il doit commencer à être un peu malade, lui aussi. Je me demande si je n’ai pas un cachet pour la gorge dans mon sac. Je cherche.
Non, je n’en ai pas. Tant pis, il crèvera du sida de la gorge, de toute façon, je préfère regarder l’écran que m’occuper de lui.
Dis donc, dis donc, le son est très fort dans cette salle. J’ai l’impression que Natalie Portman me beugle son désespoir d’être une First Lady dans les oreilles, ce qui n’est pas forcément mon rêve, mais bon, je prends sur moi, et continue à manger mon popcorn pour couvrir le bruit de ses lamentations. Un peu trop sucré, ce popcorn d’ailleurs, on voit que le taux de diabète de ses usagers n’intéresse que très peu la direction du cinéma. Pas grave, j’ai pris du coca pour faire couler.
Les gens derrière moi sont un peu bruyants quand même. C’est à dire que je me fous de savoir que « Céline n’est pas venue parce qu’elle est avec son nouveau mec, elle vient de m’envoyer un message ». J’ai envie d’entamer une conversation à bâtons rompus avec mon pote, juste pour les emmerder, mais je me retiens, et à la place, je me lève pour aller aux latrines, tâtonnant un peu pour réussir à m’extraire de mon siège, puis j’abandonne, décidant à la place de faire un maximum de bruit et de bien gêner l’espace visuel de toute la salle. Rien à foutre, je te dis, je suis la Booba des salles de cinéma, j’ai les moyens de raquer (big up à la carte UGC) et zéro respect. Ils avaient qu’à aller voir un film néerlandais sous titré en serbe s’ils ne voulaient pas être dérangés par une meuf qui mâche fort au bord de l’incontinence, là ils sont coincés avec moi dans une salle pendant 1h40, et tant pis pour eux.
Quand je reviens des toilettes, soulagée et heureuse, Natalie est encore en train de chialer. Ça va, on a compris, tu es triste, JFK est mort ( si ça te spoile le film, c’est que tu as vraiment besoin de te replonger dans tes livres d’histoires), mais c’est pas une raison pour nous infliger tes reniflements toutes les cinq minutes Nat’. Si c’est avec ça que tu comptes gagner l’Oscar, moi avec ma bronchite, j’ai toutes mes chances aux Golden Globes. Y a une différence entre une performance d’actrice et un rhume, et la différence c’est 10 millions de dollars. Spéciale Dédicace à tous les smicards.
Et BAM, mort de JFK. PUTAIN ils l’ont pas loupé, le mec ressemble à une moussaka, et sa cervelle salope la jupe rose de Nat’. Bien joué mec ! On voit que le type n’a jamais tenté de se détacher une fringue pâle avec du K2R. En plus, ça m’a tout l’air d’être une jupe Chanel en coton, ça va laisser des marques, c’est sûr. Moi une fois, je me suis assise sur une part de tarte à la framboise lors d’un brunch, bin j’avais ruiné ma robe. Je raconte l’anecdote à mon pote, qui me demande de fermer ma gueule. Sympa, sachant que c’est moi qui l’ai invité.
Pfiou, ça commence à être un peu longuet là… Oui, on le sait, Nat’, tu es en deuil, tu l’aimais même s’il t’as latté ta jupe, et c’était un grand homme. Du coup, tu lui organises des funérailles de ouf, avec chevaux, procession et tout le bordel, pour prouver aux américains que ouais, c’était pas n’importe qui. Je baille en finissant mon coca.
Je regarde l’heure sur mon portable. Il est 21h, le film ne va pas tarder à se terminer. Je boulotte mes popcorns, au prix que ça coûte, pas question d’en laisser une miette. Le bruit résonne dans la salle, entre deux sanglots de Nat’, qui ferait bien de se prendre un petit juvamine, car je l’ai connue plus en forme.
Les gens autour de moi sont relativement émus , et là j’ai droit à l’avalanche de mouchoirs et reniflements dans la salle, parce que » franchement elle est super émouvante à être digne dans le deuil » ( dixit ma voisine de droite, que pour les besoins de l’histoire nous rebaptiserons « voisine de droite »). Pendant ce temps là, pepouze, je fais un petit tour sur Facebook, avec la luminosité de mon écran de portable à fond, histoire de leur donner une vraie raison de pleurer des yeux.
En résumé
Bon j’ai fini mes popcorns, roté mon Coca, le film peut se terminer, je suis prête. Ah! La musique commence, les dernières images se profilent, le noir se fait sur l’écran, et le nom du réalisateur apparaît (Spoiler Alert : c’est pas Claude Zidi). Les lumières de la salle de ciné se rallument direct, ambiance gestapo, pour signifier aux spectateurs de dégager pronto.
Avec mon pote, on sort en bavassant sur le film. Mon avis éclairé de cinéphile me fait dire « C’était sympa, mais pas top », ce qui vous prouve encore une fois la finesse de mes analyses. Lui me dit « Mais Portman était vachement bien, ça serait bien qu’elle ait l’Oscar ».
Je sors du cinéma, toujours accompagnée de mon pote, et je m’allume une cigarette, me jurant que le prochain qui met « Oscar » dans la même phrase que « Portman », je lui mets un coup de poing en pleine glotte. Mon portable émet le bip un chouïa énervant m’indiquant que j’ai un nouveau SMS. Je regarde. Maman : « J’espère que le film t’a plu, apparemment Natalie Portman mérite l’Oscar ». Tu n’aurais jamais dû Maman, et je me vois dans l’obligation de révoquer ton droit de m’envoyer des textos autrement que pour me proposer de venir manger ta blanquette.
Voilà, en gros, comment j’ai occupé mon jeudi soir. La salle était agréable, malgré la foule, et mes popcorns étaient bons.
Puis qui sait, Natalie Portman aura peut-être l’Oscar ?