Ghost : entre musique et théâtre de l’Enfer
Ghost, c’est ce type de groupe dont tu entends souvent parler mais en te disant que tu écouteras plus tard parce que ça te parait beaucoup trop kitsch pour être bien. Grossière erreur cher ami ! Tu es en train de passer à côté d’une pure merveille ! Alors c’est parti, on met les a priori de côté et on se laisse porter par cet univers de l’Enfer. Installe-toi confortablement, ouvre bien grand tes paupières, et laisse-moi te présenter Ghost.
If you have Ghost, you have everything
Ah la la, j’entends d’ici la foule en furie en train de scander « Hail Satan, Archangelooooo, Hail Satan, Welcome year zeeeroooooo », c’est si beau ! Bon, je me calme, je me concentre et je vous parle de ce groupe si FORMIDAAABLE.
Pour celles et ceux qui ne connaitraient pas ce groupe (sérieusement ? Vous vivez dans une cave ou quoi ?), Ghost, officiellement nommé Ghost BC, c’est quoi ? Pour moi, très grande adepte de métal/comédie musicale/danse/théâtre, ce groupe est le combo parfait de quasi toutes mes passions. Bienvenue donc, dans cet univers clérical qui prône la gloire à Satan (si si) sur un fond de Heavy metal avec des chœurs de dingues et un style qu’il-n’y-a-que-eux-qui-peuvent-le-faire.
Dans une interview, une Nameless Ghoul que je soupçonne d’être en fait Tobias Forge explique la naissance de Ghost :
Ghost commença lorsque j’ai joué un riff aux autres membres du groupe. J’ai trouvé que c’était probablement le riff le plus « heavy metal » qui puisse exister […] et au moment de rajouter les paroles, le morceau semblait réclamer de lui même des mots venant d’un univers sataniste. C’était en 2006. Quand nous avons trouvé le nom Ghost, il nous a semblé évident que nous devions construire quelque chose autour de cette imagerie particulière. Ce concept nous a permis de combiner notre amour pour les films d’horreurs et bien sûr, les traditions du metal scandinave.
J’ai pour ma part découvert Ghost par hasard lors du Hellfest 2016, alors que j’attendais bien sagement en Mainstage 1 pour le concert de Black Sabbath. J’avais d’ailleurs déjà croisé leur route sans le savoir en 2011, où je me rappelle avoir été intriguée par le visuel du groupe. Ben oui, un pape fantomatique ce n’est quand même pas très commun !
Un concept de l’Enfer
Ghost ce n’est pas uniquement un groupe de musique. Tout leur univers tourne autour d’un véritable concept qui fonctionne de pair avec la musique qu’ils nous proposent, et c’est aussi ça qui les rend exceptionnels. Car ce n’est pas un groupe qui ne fait que s’écouter, Ghost ça se regarde aussi.
La recette est simple : prenez les fondements du domaine clérical, soit un pape et ses disciples, et reformez le tout, version culte satanique. Vous obtenez ainsi un univers visuellement spectaculaire truffé de divers sigles mystiques et de superbes costumes, mais aussi une source d’inspiration intarissable pour aborder des thèmes toujours plus sombres.
C’est ainsi que vous rencontrerez sur scène des musiciens tout de noir vêtus et entièrement masqués nommés les Nameless Ghouls, différenciables uniquement grâce aux sigles épinglés sur leurs tenues. À leur tête, vous rencontrerez le fameux Papa Emeritus qui cédera sa place à Papa Emeritus II et III au fil des albums. Ce changement de Papa est selon moi une idée parfaite, qui permet au groupe de justifier leurs modifications musicales et visuelles à la sortie de chaque nouvel album.
Papa Emeritus I |
Papa Emeritus II © Ghost BC |
Papa Emeritus III © Ghost BC | Nameless Ghouls |
L’anonymat longtemps préservé du groupe a permis au public une immersion totale dans l’univers proposé par Ghost. Ce ne sont pas un chanteur et ses musiciens qui se produisent sur scène mais bel et bien Papa Emeritus et ses Ghouls. Ce sont ces créatures qui chantent et idolâtrent Lucifer et non pas les véritables humains derrière les masques. Ghost représente un concept, un show mais certainement pas un réel culte sataniste !
Si aujourd’hui l’identité du leader de Ghost n’est plus un secret (non je ne parlerai pas ici du procès et bla bla bla, ce qui m’intéresse c’est la musique !), cela ne gâche en rien l’image du groupe. Et bien oui, c’est Tobias Forge qui s’est retrouvé en conflit avec ses musiciens et non pas Papa Emeritus III et ses Ghouls ! L’incarnation de personnages fonctionne donc toujours très bien même si les identités des membres sont maintenant connues.
Le concept s’est d’ailleurs renouvelé cette année encore pour nommer Cardinal Copia à la tête des Nameless Ghouls et non plus un Papa (laissons la place aux jeunes !). Cela nous promet une nouvelle fois encore de belles surprises !
Une musique merveilleusement infernale
Lors de mon Hellfest de 2016, Ghost présentait surtout l’album Méliora, une véritable perle. Je me souviens être sortie de ma rêverie dès les premières notes du concert, mais c’est véritablement durant le 3ème morceau Cirice qu’ils m’ont complètement envoûtée. Je n’étais d’ailleurs pas la seule ! Tout autour de moi, le public semblait également être conquis à chaque nouveau titre. Un très joli moment qui me reste encore bien en mémoire !
Après avoir à peine posé mon premier orteil hors de ma voiture à la fin du festival, je me suis précipitée sur mon ordinateur pour récupérer la discographie entière. Ce fut chose aisée car à ma grande surprise, ce groupe était encore un petit bébé, leur premier album Opus Eponymous étant sorti en 2010.
Bien que musicalement moins élaboré que les albums qui suivront (daaah en même temps c’est un peu normal), ce premier opus pose déjà les fondements emblématiques de Ghost. Des riffs Heavy metal parfois un peu trop lourds, avec des paroles évoquant rituels sanglants, créatures sadiques fort sympathiques et autres invocations à Satan. Un bon petit début quoi.
Partie dans ma lancée, j’ai immédiatement découvert leur deuxième album Infestissumam et là BAM deuxième claque. Dès les premières notes, on en prend plein la figure. Des morceaux puissants avec des chœurs superbes et des influences variées qui permettent au groupe de nous offrir une véritable diversité dans un même opus. Mon coup de cœur de cet album restera le morceau Monstrance Clock, magnifique hymne à la sensualité revisité version « culte satanique » qui termine ce voyage mystique en beauté grâce à son chœur façon gospel. Un pur délice.
Ghost, un groupe qui vous veut du bien
Bon, après deux albums aussi mythiques que Infestissumam et Meliora, ainsi que cette histoire de procès, Ghost était clairement attendu au tournant à la sortie de leur nouvel album. Alors du coup, ce petit dernier Prequelle, ça donne quoi ?
Et bien les gars… encore une fois CHAPEAU. Perso, j’ai A-DO-RÉ.
Même au bout du quatrième album, Ghost arrive à nous surprendre, et plus d’une fois. Ils nous avaient annoncé un thème plus « dark » et on est servi ! Musicalement, on se rapproche plus du hard rock des années 80 et notre popotin se plaira à se dandiner sur les morceaux tel que Rats ou Dance Macabre. En revanche dans les paroles, nous sommes immédiatement plongés dans une noirceur de l’extrême. Le thème médiéval prédominant amène en première ligne le sujet de la peste noire (entre autres) que l’on retrouve dans plusieurs morceaux de l’album. Image excessivement bien trouvée pour faire la critique de manière détournée (ou pas) de notre société actuelle. En ce qui concerne le premier clip de cet album, j’ai personnellement été plus que comblée ! Pour nous présenter Cardinal Copia, Ghost nous offre un clip très eighties à la Mickael Jackson et d’ailleurs… ÇA DANSE ! Oui oui parfaitement, ça danse, et ça a du style ! Niveau future prestation scénique, ça promet !!!!!
Pour les fans inconditionnels de Ghost, n’ayez crainte, on reconnait très bien leur patte si unique. Le titre instrumental Miasma par exemple, m’a immédiatement rappelé Majesty de l’album Méliora dans ses riffs et son ambiance musicale générale. Mais pile au moment où j’ai osé penser que ce morceau me donnait une fâcheuse impression de déjà-vu (shame), est apparu… le SAXO ! Oui Mesdames et Messieurs, vous avez bien lu, un saxo. Vraiment, bien joué les gars, celle-là personne ne l’avait vue venir !
J’ai également été ravie de retrouver des ballades avec cette fois, un piano bien plus omniprésent. Dans ces fameux morceaux, Ghost a su garder ce sarcasme qui me plait tant chez eux. En effet, ils ont cette capacité à utiliser des mélodies douces et travaillées pour dépeindre la mort à l’état pur (Pro Memoria) et la souffrance (See the Light). Magnifique !
On peut d’ailleurs aisément considérer le titre Pro Memoria comme l’équivalent de He Is de Méliora, qui nous permettra de chanter poing levé pendant leur concert : « Don’t you forget about dying, Don’t you forget about your friend death, Don’t you forget that you will die. » De la joie de vivre en boite quoi.
Je terminerai sur Prequelle en évoquant le deuxième morceau instrumental de l’album, Helvetesfönster (heureusement que je ne présente ce titre qu’à l’écrit…) qui en suédois signifie littéralement « porte de l’enfer ». Ce titre est en fait une référence à l’habit médiéval porté par certaines femmes aisées, tellement échancré sur les côtés que les hommes mal intentionnés pouvaient apercevoir la poitrine et les hanches de ces dames et ainsi voir leur éternelle damnation, soit une porte pour l’enfer. Référence parfaite pour Ghost, qui évoque l’époque médiévale et la damnation éternelle avec brio.
Ghost, c’est pour moi ce groupe qui a su trouver l’équilibre parfait entre un concept bien précis et une recherche musicale intéressante. Leur univers de base leur permet, à couvert de leurs personnages, de complètement et sarcastiquement se plonger dans ces thèmes bien dark comme on les aime, et ça marche !
Leur quête perpétuelle de nouveauté aboutit à des résultats parfois inattendus mais qui fonctionnent pourtant à merveille. Il en va de même pour leur identité visuelle qui ne reste pas non plus figée, ce qui permet à Ghost de toujours aller plus loin et d’utiliser toutes les possibilités offertes par leur concept de base.
A chaque nouvel album, on ressent bien leur désir constant d’expérimenter et de proposer de nouvelles choses mais toujours en gardant cette identité qui leur est propre. Et c’est actuellement ce qui forge l’une des plus grandes richesses de ce groupe.
Leur dernier album Prequelle n’échappe pas à la règle et offre à Ghost l’opportunité de nous montrer une fois de plus son potentiel musical et théâtral.
Pour résumer, vraiment, si vous en avez l’occasion, allez les voir en concert. Avec leur mise en scène de l’enfer et leur musique au top, vous ne serez pas déçus, parole de troll !