City Hall, le maître du manga à la française
Imaginez notre monde si le papier et l’écriture manuscrite étaient interdits depuis des siècles…
Londres, à l’aube du XXe siècle. Le Ministre des Finances vient de se faire assassiner en plein cœur de la ville. Une fois sur les lieux du crime, la vue d’une petite feuille de papier sur le cadavre semble bien plus choquer l’inspecteur Lester que la vue du corps lui-même…
En effet, le papier et l’écriture manuscrite ont disparu depuis le XVIIIe siècle, après avoir été prohibés. Depuis ce jour, les écrivains doivent utiliser des machines à écrire spéciales, qui permettent de produire des livres numériques. Peu de personne connaissent les véritables raisons de cette interdiction tant l’information est classée secret défense…
Au XVIIe siècle, on découvrit une propriété incroyable au papier : tout ce que l’on pouvait écrire prenait vie. D’abord émerveillés par ce phénomène, les humains façonnèrent de plus en plus d’êtres de papier appelés « papercut ». Puis, la cupidité des uns et le désir de pouvoir des autres déclenchèrent une guerre sans précédent dans l’histoire. S’affrontant par le biais des papercuts, l’humanité manqua de détruire la Terre. Lorsque les autorités prirent le dessus et firent de nouveau régner l’ordre, elles décidèrent d’interdire l’usage de l’écriture manuscrite et détruisirent tous les stocks de papier.
Tout du moins, c’est ce qu’elles croyaient… Comment ce criminel, le mystérieux Lord Black Fowl, peut-il être en possession de papier et comment peut-il savoir écrire deux siècles après l’interdiction ?
Deux romanciers de génie, le célèbre Jules Verne et son acolyte, le jeune Arthur Conan Doyle, sont choisis pour devenir l’équipe d’élite chargée de répondre à ces questions, de démasquer et d’arrêter celui en passe de devenir l’ennemi public n°1…
Un casting de rêve
– [Jules Verne] Arthur Conan Doyle !! Étudiant, écrivain amateur, chimiste débutant…et historien novice !!
– [Inspecteur Lester] Quelqu’un qui a tout à apprendre, en somme…
– [Jules Verne] Vous auriez tort de le penser, capitaine !
– [Lester] Inspecteur !!
– [Jules Verne] Peu importe…Je disais donc qu’il existe un domaine dans lequel il nous surpasse tous… !! Et croyez-moi sur parole lorsque je vous dis que toutes vos années d’expérience policière risquent de ne pas souffrir la comparaison !!
City Hall tome 1, chapitre 2
C’est avec plaisir qu’on redécouvre les auteurs cultes qui ont marqué notre culture littéraire. Mieux encore, Rémi Guérin et Guillaume Lapeyre, les créateurs de City Hall, leur ont donné des facettes qu’on n’aurait pas soupçonnées, tout en restant cohérents avec l’image qu’on se fait de ces personnalités. Qu’il est plaisant de découvrir un Jules Verne égocentrique doté d’un sens de l’humour bien à lui, ou un Arthur Conan Doyle au cœur d’artichaut .
De nombreux autres personnages historiques fleurissent les pages de City Hall et apportent leur lot d’intrigues, de manigances ou de scènes comiques. Amelia Earhart, Al Capone, Malcolm X… Vous apprécierez ces clins d’œil aux personnages célèbres du siècle dernier.
Le but n’est pas de rendre compte d’une réalité historique mais bien de mettre en scène des personnages au talent ou à la personnalité complémentaires.
Un univers steampunk, entre fiction et réel
– [Jules Verne] : Des cookies sans une tasse de thé, ça n’a pas de sens pour vous autres Anglais ! (…)
– [Arthur Conan Doyle] : Alors qu’une machine de la taille d’un bateau pour faire des pâtisseries, c’est tellement plus logique…
City Hall tome 1, chapitre 4
L’intrigue prend place dans le Londres du début du XXe siècle, mais il s’agit d’un siècle alternatif puisque l’interdiction du papier et de l’écriture manuscrite a changé ce qui aurait dû être notre passé. La révolution industrielle a bel et bien eu lieu mais la technologie de la machine à vapeur s’est tellement développée qu’on découvre une société qui semble autant évoluée que la notre en terme de techniques, si ce n’est plus. Les livres numériques sont omniprésents, Internet a déjà fait son apparition et d’immenses créatures de papier (rappelant les méchas japonais) peuvent s’affronter grâce à la puissance de l’esprit et de l’imagination.
Les amateurs du genre steampunk seront comblés avec City Hall. Qu’il s’agisse du style vestimentaire, de l’époque dans laquelle se situe l’intrigue, des machines et autres inventions fabuleuses… Tout cet univers se reflète dans ce manga de manière précise et habilement mené par les dessins et le scénario.
Un duo de choc
– [Arthur Conan Doyle] Elle t’a traité de « français »…
– [Jules Verne] Elle t’a traité de « fanfaron »…
City Hall tome 1, chapitre 5
On doit la qualité de City Hall au fait qu’il s’agisse d’une collaboration de deux amis : Rémi Guérin, scénariste, et Guillaume Lapeyre, dessinateur. Chacun maîtrise son métier et leurs arts respectifs se complètent harmonieusement. Cette double compétence, l’écriture et le dessin, apporte une richesse rare à leur œuvre.
Alors que la plupart des mangas s’appuient principalement sur l’image (le scripturaire étant alors au service du visuel), City Hall a la particularité de rendre complémentaire l’écriture et le dessin. L’un n’existe que par sa relation avec l’autre.
Les dessins de Guillaume Lapeyre sont magnifiques et n’ont rien à envier aux mangaka japonais. Il maîtrise parfaitement sa technique et livre des visuels subtils et précis. Parallèlement, Rémi Guérin montre, avec cette série, son don d’offrir des scénarios pointus et passionnants qui savent tenir le lecteur en haleine avec leur dose de suspens et de rebondissement.
Du fait de leur complicité et de ce travail en équipe, les deux auteurs réussissent à créer une œuvre complète et aboutie qui est tout sauf bancale.
Pour aller plus loin, nous avons interviewé Rémi Guérin, le scénariste de City Hall. Merci beaucoup Rémi d’avoir prix le temps de répondre à nos questions ! ;)
Pour finir, les petites citations à chaque chapitre sont très appréciables, on est contents de les redécouvrir (ou de les découvrir, tout simplement).
Merci à Ankama de soutenir les créations françaises et de prouver que les « global mangas » n’ont rien à envier aux mangas japonais !
Article et itw réalisés par Marichka Besse
Il fallait céder à la tentation ! ;p Sincèrement, cette série est un bijou, tant au niveau du scénario que des dessins, tu peux y aller les yeux fermés :) Et comme c’est une série courte, la fin a été pensée depuis le départ, l’intrigue est donc très bien ficelée !
Ah je savais bien que c’était ça !! J’ai failli acheter les 2 premiers tomes cet après midi :)